06.07.2010 / SANTé ET AFFAIRES SOCIALES VINGT CINQUIèME RAPPORT ANNUEL
Les Programmes de Médecine Préventive
Les programmes de médecine préventive, au nombre de 27 en 2008[1], couvrent la majorité des maladies transmissibles, non transmissibles et chroniques. Les crédits de paiement consacrés à ces programmes[2] se sont élevés durant la période du Xème Plan à 55 MD et les prévisions pour le XIème Plan sont de l’ordre de 75 MD. En plus des crédits inscrits au budget de l’Etat, d’importantes ressources étrangères s’élevant à l’équivalent de près de 30 MD durant la période 2006-2010 ont été allouées à certains programmes préventifs dans le cadre de conventions conclues avec le Fonds mondial de lutte contre le sida, la tuberculose et le paludisme.
Le contrôle entrepris par la Cour des comptes a porté sur les principaux programmes nationaux de médecine préventive jusqu’au mois de juin 2009, et ce, pour évaluer dans quelle mesure les différents intervenants dans ce domaine ont réussi à mobiliser les moyens permettant de réaliser ces programmes et à en maîtriser la mise en œuvre, le suivi et l'évaluation.
1. Les programmes de médecine préventive dans le domaine des maladies transmissibles
Les programmes nationaux de prévention ont permis d’éradiquer de nombreux fléaux et de maîtriser de manière efficace quelques autres maladies comme le sida et la tuberculose.
v Le programme national de prévention du sida
Les parties concernées ont réussi, grâce au programme instauré depuis 1987, à limiter la propagation du virus du sida puisque 1499 cas, seulement, ont été enregistrés depuis l’apparition du premier cas. Le renforcement des acquis réalisés dans ce domaine exige une vigilance constante.
Le programme national de lutte contre cette maladie s’est orienté, durant la période 2006-2010, principalement, vers l’appui à la prévention à travers la création de centres intégrés de conseils et de consultations volontaires, le suivi sérologique et comportemental des groupes à risque, l’assurance de la gratuité des soins, la promotion du partenariat avec les composantes de la société civile, le suivi et l’évaluation de la riposte nationale à cette maladie.
Outre les ressources provenant du budget de l’Etat et s'élevant à 5,4 MD pour la période 2006-2009, ce programme a bénéficié dans le cadre du projet d’appui à la riposte nationale au sida, d'une dotation du Fonds mondial de lutte contre le sida, la tuberculose et le malaria de l'ordre de 17,3 millions de dollars américains pour la période 2007-2011.
La réalisation des composantes du programme destinées aux groupes les plus exposés à la contamination demeure l'un des défis majeurs à relever par ce programme. Celui-ci nécessite, en outre, la mise en place d’un système de gestion intégré de ses différentes composantes et appelle l’adoption d’un système de suivi-évaluation.
v Le programme national de lutte contre la tuberculose
Malgré la diminution remarquable des cas de malades atteints de la tuberculose, la situation épidémiologique fait apparaître une augmentation de l’indicateur des nouveaux cas par année pour chaque 100.000 habitants qui est passé de 18,9 cas en 2002 à 21,7 cas en 2008.
Le programme national de lutte contre la tuberculose a bénéficié d’un plan national depuis le mois de juin 2008, couvrant la période s’étendant jusqu’à 2015.
La situation prévalant au regard de cette maladie appelle à prendre les mesures nécessaires pour pallier les insuffisances relatives au diagnostic des cas de contamination chez les personnes à risque à l’instar de celles en contact avec les tuberculeux et à renforcer la couverture nationale par des laboratoires de culture des bacilles de cette maladie pour que leur nombre atteigne l’indicateur défini par l’Organisation mondiale de la santé.
Le programme national de lutte contre la tuberculose appelle, en outre, au renforcement, au niveau national, des ressources humaines nécessaires à la bonne exécution des opérations de coordination, de suivi et d'évaluation.
2. Les programmes de médecine préventive dans le domaine des maladies non transmissibles et chroniques
Les travaux de vérification ont concerné les programmes nationaux relatifs à la prévention du diabète et de l’hypertension artérielle, la prévention des cancers du sein et du col de l’utérus et la prévention du handicap.
v Le programme national de la prévention du diabète et de l’hypertension artérielle
Ce programme, arrêté en 1993, vise à assurer, au niveau des structures de santé de première ligne, une bonne prise en charge des malades atteints de diabète ou d’hypertension artérielle en vue de limiter les complications qui en découlent. La concrétisation de cet objectif demande de nombreuses améliorations tenant notamment à la promotion du dépistage précoce de ces maladies et à la mise en place de procédures de suivi dans le domaine de la formation des médecins dans les structures de première ligne. Elle appelle également le renforcement des moyens nécessaires à la bonne prise en charge de ces malades, tant au niveau des ressources humaines qu'à celui des moyens matériels (cardiographes, instruments de dépistage des altérations de la rétine et de mesure du diabète, moyens de transport et autres moyens de vulgarisation).
v Le programme national de détection précoce du cancer du sein et du cancer du col de l’utérus
Le Ministère de la santé publique a conçu, depuis 2001, un programme de lutte contre le cancer dans l’objectif de diminuer le taux de prévalence du cancer et du taux des décès causés par cette maladie, et ce, par le renforcement de la prévention primaire. Ce volet revêt, dans le cadre du plan quinquennal de lutte contre le cancer 2006-2010, une importance considérable, ces cancers étant les plus répandus chez les femmes.
Le cancer du sein est situé en première position des cancers qui touchent les femmes. Le taux des cas de cancer découverts au dernier stade de la maladie est de 20%. Le programme de dépistage précoce du cancer du sein a pour objectif de généraliser l’examen clinique à toutes les femmes qui consultent les centres de soins de santé de base et les centres de l’Office national de la famille et de la population (ONFP) et d'orienter vers la détection par mammographie celles dont l’examen clinique décèle une tumeur du sein.
Durant la période 2003-2008, les examens assurés par les centres de l’ONFP ont concerné 500.000 femmes dont 33.000 ont été orientées vers le dépistage par la radiographie, soit un taux de 6,6%. Compte tenu du nombre insuffisant d’équipements dans le secteur public et du coût élevé des examens dans le secteur privé, seulement 30 % des femmes orientées vers le dépistage par mammographie ont pu s’y soumettre.
Le dépistage clinique réalisé dans les centres de soins de santé de base a touché 124.000 femmes en 2008. Au mois de juin 2009, ces centres n'ont pas encore commencé à repérer celles ayant des antécédents familiaux de cancer parmi les femmes qui ont bénéficié d’un examen clinique alors que le programme vise à couvrir 80% d’entre elles par une mammographie tous les 3 ans.
Le programme de détection précoce du cancer du col de l’utérus, au niveau des centres de soins de santé de base, a été mis en place sans que les procédures à appliquer soient définies en ce qui concerne le suivi des femmes ciblées, la disponibilité des moyens de prise des échantillons, l’enregistrement de ces échantillons, leur envoi aux laboratoires et le suivi des résultats. La direction régionale de la santé de Tunis s'est distinguée par l'adoption d’un plan de travail régional à cet effet.
L'insuffisance des moyens de détection et des produits consommables a causé l’arrêt de ce programme dans nombre de structures de santé. Cette situation nécessite, dans certaines régions, la mise en place de laboratoires d’ana-pathologie et l'affectation de techniciens supérieurs spécialisés en nombre suffisant.
v Plan national de prévention de l’handicap
Les travaux de vérification n’ont pas permis de s'assurer de l’existence d’un système de détection des handicaps et de la réalisation d'études scientifiques servant de base aux programmes préventifs visant l’amélioration de la détection prénatale, notamment par la sensibilisation à l’importance de l’examen pré nuptial.
En ce qui concerne la détection précoce, pré et néo-natale, il s’est avéré que les mesures de détection de la trisomie 21, de la constitution congénitale de l’embryon et de la toxoplasmose ne sont pas encore adoptées. L’application, limitée à 3 structures sanitaires depuis 2005, du système de détection des handicaps congénitaux causés par la rubéole chez les femmes enceintes, nécessite une participation plus active de la part des superviseurs des services médicaux concernés.
3. Les mesures d’accompagnement
Les mesures d’accompagnement des programmes de prévention concernent principalement la carte sanitaire et le système d’information.
v la carte sanitaire
Les pouvoirs publics ont œuvré au rapprochement des soins sanitaires des citoyens et ont établi à cet effet un indicateur consistant à disposer d’un centre de soins de santé de base pour 5000 habitants. Cet objectif a été atteint et 95% de la population habitent à une distance ne dépassant pas 5 km du centre de santé de base le plus proche. Néanmoins, dans certaines régions, les structures de première ligne ne sont pas suffisamment dotées en équipements et en ressources humaines, notamment en médecins. Bien qu’une carte sanitaire numérique ait été mise en place depuis le mois d’aout 2007, son exploitation n’a pas été étendue, jusqu’au mois de mai 2009, à la majorité des régions.
v Le système d’information
L’exécution des programmes de médecine préventive et la supervision de leurs différentes composantes nécessitent un système d’information exhaustif et intégré permettant de générer des informations précises et fiables de nature à supporter efficacement le processus de prise de décision, étant donné que l’échange des informations entre les différents services intervenant dans ce domaine est encore manuel à tous les niveaux. Cette situation appelle à asseoir la coordination nécessaire dans ce domaine et à maîtriser la fonction de collecte des données statistiques, leur évaluation et leur mise à la disposition des utilisateurs de façon permanente.
Le fonctionnement adéquat de l’Observatoire national des maladies nouvelles et émergentes créé en 2005 nécessite que son organisation soit parachevée et que ses prestations soient améliorées dans le cadre d'une coordination étroite avec le reste des intervenants dans ce domaine.
[1] - 20 de ces programmes sont supervisés par la Direction des soins de santé de base relevant du Ministère de la santé publique.
[2] -sous forme d’investissements directs inscrits au titre II du budget du Ministère.


